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Le dernier samouraï (exposé CPES)

Publié le 5 Décembre 2011, 11:36am

Catégories : #Philo & Cinéma

 

Exposé de mr Stanislas Garel (CPES 2011-2012) : Le dernier samouraï

Informations cinématographiques :

Réalisé par Edward Zwick

Produit par Cruise et Wagner

Algren: Tom Cruise

Katsumoto: Ken Watanabe

Emperor Meiji: Shichinosuke Nakamura

 Synopsis:

                 Le dernier Samouraï se déroule au Japon, pendant l’Ere Meiji au XIXème siècle. Le Japon se modernise et pour favoriser cela, une désamouraïsation de la société est mise en place. La modernité et la tradition se battent pour l’âme du Japon mais l’Empereur considère les Samouraï comme un obstacle a la modernisation et au bien-être du Japon.

                Ce film retrace l’histoire d’un ancien vétéran de l’armée américaine, le capitaine Nathan Algren, qui doit mater la révolte du Samouraï Katsumoto. Ancien vétéran de la guerre de Sécession, cet officier est un héros de la conquête de l’Ouest. Soldat alcoolique, déçu et tourmenté, il ne se bat que pour l’argent. Algren est fait prisonnier dès la première bataille contre la rébellion Samouraï de Katsumoto. Il va passer plusieurs saisons en captivité et va apprendre à vivre auprès des Samouraï. La découverte du Bushido et l’apprentissage de ce qu’est un Samouraï va le bouleverser profondément. Finalement il combattra aux côtés de son ancien ennemi Katsumoto contre l’armée de l’Empereur qu’il entrainait jadis.

         

        Introduction :

         En tant qu’élève aspirant à être un futur officier, il serait donc intéressant de se pencher sur la notion du soldat. Avant d’être soldat, nous sommes avant tout des hommes. L’Homme, selon Descartes,  possède deux dimensions parallèles que sont l’âme et le corps. Nous devons prendre pour acquis que le soldat est un homme et que par conséquent, il faut le définir par rapport à ces deux dimensions. Au début du film, Nathan Algren tient un discours quelque peu surprenant : « Je tuerai des Japos. Confédérés, Sioux, Cheyennes. Pour 500$ par mois je tuerai tout ce que vous voudrai… ». Etre Soldat, veut il simplement dire, porter un uniforme et combattre pour une nation qui vous paye ? Il nous apparait clairement que cette définition est celle du mercenaire. Nathan Algren, quoique héros de guerre, fait preuve de cupidité et traduit une absence d’idéal surement dû a certaines désillusions de la guerre ou certaines réalités empiriques destructrices de la violence. Face à cette vision de Algren, nous verrons celle du chef rebelle et Samouraï, Katsumoto.

          Mais qu’est-ce qu’être Samouraï ? Se consacrer à un ensemble de principes moraux, se préparer à mourir et observer le Bushido qui est le code de vie du Samouraï pour suivre la voix du guerrier. Le code du Samouraï symbole d’un code d’honneur ancestral peut-il s’appliquer au soldat moderne actuel d’une manière universelle ? Nous déterminerons tous d’abord les valeurs principales morales samouraï du samouraï  pouvant être universalisé pour tout soldat tel que le courage, le respect, la loyauté et le devoir et enfin la tempérance. Puis nous verrons comment le samouraï accède t’il a une paix intérieure et comment peut-on accéder à la tranquillité de l’esprit en s’affranchissant de contraintes propres au  combattant.  Le but sera d’étudier le mode de vie du Samouraï en tentant de montrer que son application reste possible pour le soldat moderne et que ce mode de vie pourrait-être universalisé au soldat en général.

  Le Courage :

     Le courage est la première valeur du Samouraï au combat. Le Samouraï est un guerrier détenteur de l’art de combattre et de l’art du sabre. Il ne fuit jamais devant l’ennemi et ne supporte pas la honte de la défaite comme nous le voyons dans ce film. Mais n’y a-t-il pas assimilation du courage et de la témérité. Dans le film, Algren et Katsumoto parlent du général Custer. Ce dernier avait lancé un bataillon de deux cent onze soldats contre deux mille indiens. Pour Katsumoto, ce général est génial et ses hommes ont eu droit à une très belle mort. Mais pour Algren, ce général est un véritable assassin qui a laissé tuer tous ses hommes par désir de gloire. La notion de courage apparait alors comme totalement subjective. C’est Aristote qui nous énonce la théorie de : la morale du juste milieu. Bien loin de cette morale héroïque qui confine à la sainteté, la morale d’Aristote repose sur l’idée de juste moyenne également éloignée de l’excès et du défaut. Ainsi le courage, qui est une vertu, évite-t-il aussi bien la témérité, qui est un excès, que la lâcheté qui est un défaut. Ainsi, le courage doit éviter la témérité du général Custer admiré par Katsumoto mais il doit également éviter la lâcheté. Mais ce juste milieu n’est pas une faiblesse. Il représente au contraire une excellence que l’on acquiert difficilement. D’ailleurs le nom grec signifiant « vertu » veut dire « excellence ».

 Le Respect :

     Dans ce film, nous pouvons avoir tendance à oublier qu’Algren est un prisonnier de guerre. En effet, il n’est pas maltraité par les Samouraïs mais au contraire Algren est soigné par la femme dont il a tué le mari. Il est parfaitement nourri et logé, et est seulement accompagné d’un garde qui le surveille tout en restant à distance. Pas de chaines, de barreaux, de prisons et une absence de mauvais traitements. Katsumoto respecte totalement Algren et lui rappelle que ne pas se présenter est considéré comme extrêmement grossier même entre ennemis. La courtoisie étant une preuve de respect, nous pouvons constater que ce dernier est parfaitement présent. Kant est le philosophe qui a donné à la dignité son sens actuel.  En effet, avec Kant, la dignité devient une valeur inaliénable : la dignité est le simple fait qu’un homme existe en tant qu’être raisonnable. La dignité induit un impératif dont l’universalité permet de penser à un idéal règne des fins : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin et jamais simplement comme un moyen. » On appelle donc respect cette connaissance ou reconnaissance de la dignité  de  l’être raisonnable qu’est l’homme. Dans le cadre de la guerre, il ne faut pas concevoir l’homme comme un moyen permettant d’atteindre un objectif allant dans les intérêts d’un autre homme. En effet, la guerre n’est pas un acte individuel mais un conflit collectif. Par conséquent, l’homme se bat pour un idéal et pour le bien commun de la société ou pour l’intérêt national ou général. Il ne peut donc pas être perçu comme un moyen.

La Fidélité et le Devoir :

        Samouraï veut dire  «Servir ». Le Samouraï sert une cause, une autorité ou des valeurs qui doivent perdurer. Il agit par devoir et c’est pour cela que sa fidélité est absolue. Kant définit le devoir comme la nécessité d’accomplir une action par respect de la loi. Il ne suffit pas qu’une action soit conforme au devoir pour être morale et donc pour que le devoir soit accompli. Il lui faut être accompli, par devoir. Concrètement, le devoir doit être accompli de manière totalement désintéressé. Le devoir ne doit pas être accompli car nos intérêts personnels seront favorisés. « Il faut parce qu’il faut  »  est une bonne illustration de ce propos. Katsumoto se bat pour l’âme du Japon et son sabre est au service de l’empereur. La rébellion de Katsumoto n’a aucune ambition politique, financière, ni aucun désir de gloire ou de pouvoir. Elle n’a pour but que de protéger le Japon, de vouloir son bien et de servir l’empereur. L’être humain est animé par les mobiles de sa sensibilité plus encore que pas les motifs de sa raison mais la moralité serait toujours vaincue si les motifs ne l’emportaient pas sur les mobiles. Paul Valéry nous fait remarquer que si le bien plaisait, si le mal déplaisait, il n’y aurait pas de morale, ni bien, ni mal. Il est beaucoup plus difficile d’être moral qu’immoral, car presque toujours cela va à l’encontre de notre intérêt personnel. Katsumoto dit que si l’empereur ne veut plus de lui, il lui suffit de demander. Nous avons donc vu que le Samouraï agit par devoir selon la loi morale de par son caractère totalement désintéressé. Il est également au service de l’autorité légale qu’est l’empereur et se fidélité va jusqu’à offrir sa vie.

 

La tranquillité de l’esprit :

         Le samouraï recherche la tranquillité de l’esprit et veut s’affranchir de toutes sources de peur ou de tourment. Nous allons tout d’abord voir l’attitude du soldat américain, Algren, puis celle du Samouraï, Katsumoto, face à l’expérience de la guerre et face aux faits d’armes.

Le cauchemar :

« Tous les soldats font des cauchemars » nous dit Algren. Cette citation rapportée semble traduire une justification de la part du capitaine Américain qui veut se rassurer en tentant d’expliquer au Samouraï que cela fait partie des caractéristiques du soldat.  Le cauchemar appartient au domaine du rêve qui lui-même selon Freud est l’expression de l’inconscient. Les cauchemars échappent donc à la conscience et à la raison humaine. Bergson disait que l’inconscient était l’expression de nos actions passés, de nos expériences humaines influençant nos actions actuelles. Le passé enregistré par l’inconscient a donc une influence non négligeable sur le présent et sur les décisions conscientes que nous prenons. Les expériences de guerre d’Algren ont donc une influence sur sa vision actuelle et le tourmente chaque nuit. Mais cette tourmente nocturne, ces souffrances régulières reflètent la typologie de ses actions de guerre. Les cauchemars du capitaine reflètent donc ses expériences de guerre peu morales et même criminelles. Les actions sont donc mauvaises et peuvent être qualifiées d’exactions.  Elles sont une torture pour le soldat. Comment s’en affranchir ?

Bonne action :

        Katsumoto répond à Algren « Les soldats qui font des cauchemars sont uniquement ceux qui honte de ce qu’ils ont fait. » Pour s’affranchir de ces tourments, il faut donc s’interroger sur la typologie de ses actions et choisir entre les bonnes et mauvaises actions. Quand peut-on dire qu’une action est bonne ?  Hegel nous explique ce qu’est une bonne action : « Si l’on déclare à présent, que c’est le bon cœur, la bonne intention, la conviction subjective qui décide d’une action, l’hypocrisie n’est plus possible et d’une manière générale, il n’y a plus de mal , car, par la réflexion sur les bonnes intentions et sur les mobiles de l’action, chacun saura rendre bon ce qu’il fait et grâce à l’importance accordée à la conviction, ce qu’il fait est bon. » Cette explication correspond parfaitement à ce que nous pouvons observer dans le film. En effet, Katsumoto est doté de bonnes intentions telles que le bien du Japon et d’une forte conviction subjective. Il est prêt au sacrifice ultime qui est le don de sa vie pour ce en quoi il croit. Enfin, il réfléchit sur l’opposition entre modernité et tradition. Kant également disait que la bonne volonté était la volonté bonne, c’est-à-dire celle qui veut le bien et qui, voulant le bien, est bonne dans sa nature. De la bonne volonté doit donc résulter une bonne action synonyme de tranquillité de l’esprit. Nous avons donc vu comment Katsumoto instaure la paix dans son esprit de par la typologie de ses actions guerrières qui sont fondamentalement bonnes. Algren lui exécute des actions illégitimes et fondamentalement mauvaises tel que le meurtre de population indienne pacifique. La tranquillité du combattant est ensuite assurée par le rapport que ce dernier entretient avec la mort. C’est ce que nous allons maintenant voir.

 

Le rapport à la mort :

        La mort fait partie du destin des hommes mais ceux-ci ont la capacité de lui faire bon accueil. Les épicuriens avaient souvent dit sue la crainte de la mort est une folie. Epictète disait : « La mort, qu’est-elle ? Un épouvantail. Retourne-le et tu verras ; regarde, il ne mord pas.» Nous constatons que Algren comme Katsumoto ne craignent pas la mort au combat. L’attitude d’Algren au combat est comparée à celle du tigre blanc. Il ne craint nullement la mort et reste en première ligne contre l’ordre de son colonel. Et pendant le combat, il se jette au-devant de ses ennemis. Katsumoto va néanmoins plus loin qu’Algren dans son rapport avec la mort. Le rapport du Samouraï a la mort est très semblable à la philosophie stoïcienne. Cette dernière repose sur une distinction première entre ce qui ne dépend pas de nous et ce qui dépend de nous. Dépendent de nous les idées que nous nous faisons en nous-mêmes. Le fait de mourir, par exemple ne dépend pas de nous ; la façon dont nous mourrons, notre attitude vis-à-vis de la mort, en revanche, dépend de nous. C’est en cela que le stoïcisme va nettement plus loin que l’épicurisme en faisant l’éloge de la mort volontaire. Le suicide que les Romains pratiqueront est l’accomplissement pathétique et spectaculaire de cet effort sur soi qui caractérise la morale stoïcienne. La mentalité du Samouraï est donc très proche de la morale stoïcienne. Katsumoto sait qu’il va mourir, il est prêt et n’a pas peur mais il va bien plus loin que le simple fait de se préparer à mourir et de l’attendre. Dans le film, il dit : «  Je mourrai par le sabre. Mon sabre. » Nous pouvons constater qu’il ne veut pas subir la mort. C’est lui qui la choisit. Il se libère de la crainte de la mort mais nous pouvons aussi dire qu’il devient libre. Il s’affranchit de toutes craintes, tranquillise son esprit mais il devient libre en étant véritablement aux commandes de son existence. Epictète disait : «  Ne demande pas que ce qui arrive arrive comme tu veux. Mais veuille que les choses arrivent comme elles arrivent, et tu seras heureux. » Epictète montre bien la mentalité de Katsumoto. Ce dernier ne demande pas de mourir pas son sabre sentant approcher la mort à la bataille finale. Il veut mourir par son sabre alors qu’il est dans son jardin et c’est ce qui arrivera. Le seppuku est l’acte ultime de la morale du Samouraï.

 

Le Bushido :

        « On meurt chaque seconde. Reconnaître la vie dans chaque soupir, chaque tasse de thé, chaque vie que l’on prend. La voie du guerrier. C’est le Bushido. » Nous pouvons comparer le bushido a l’épicurisme. C’est le poète latin Horace, de philosophie épicurienne qui a inventé une expression devenue célèbre aujourd’hui : « Carpe Diem » ce qui veut dire cueille le jour, où se condense une bonne part de la sagesse épicurienne. Le Bushido comme Carpe Diem a pour but de libérer l’homme des tourments, des remords ou regrets du passé ainsi que des interrogations et de l’appréhension du futur. L’homme sage doit vivre pleinement le présent, savourer chaque moment de bonheur instantanément. Ainsi l’homme s’affranchit de toute crainte et apaise son esprit.

La tempérance :

        C’est la culture de la modération par quoi nous restons maitres de nos désirs au lieu d’en être esclave. Cette valeur est vital pour le Samouraï car elle libère son âme de tous plaisirs artificiels pour le conduire au fondamental. Elle implique le respect de soi et permet de savourer les plaisirs essentiels et naturels de la vie. Elle conduit le Samouraï à revenir ou à rester au fondement même du plaisir afin de trouver la paix. Cette valeur incite le Samouraï trouver son bonheur dans la nature même au lieu de tomber dans l’excès de plaisir artificiels conduisant au tourment de l’homme. L’exemple est Algren, noyant son malheur dans l’alcool qui devient ensuite une source de tourment. Là encore, la mise en parallèle du Samouraï et du Stoïcien est possible. Katsumoto médite dans la nature et écrit des poèmes sur les fleurs. Comme le Stoïcien, il trouve son bonheur dans la contemplation du Cosmos, symbole de la perfection, permettant une contemplation menant au bonheur. Le bien être des Samouraïs est incontestable et pendant son séjour chez eux, Algren connait pour la première fois la tranquillité. Chez le ministre, il refuse un verre de whisky, faisant acte de tempérance conduisant à la liberté de l’individu dû à son indépendance des choses artificielles.

 Conclusion :

      

         Ce film magnifique nous dépeint parfaitement ce qu’est un Samouraï. Un guerrier au service d’une cause, d’un empereur, se battant de manière idéaliste pour l’âme de son pays qu’est le Japon. Caractérisé par des valeurs morales telles le respect de l’ennemi, la loyauté, le sens du devoir et la tempérance, le Samouraï recherche la tranquillité de l’esprit. L’affranchissement des craintes de la mort, l’effort de soi pour surpasser la mort et accéder à la liberté par le seppuku, l’application du Bushido pour vivre au jour le jour. Mais même si ces valeurs sont celles de guerriers d’une système féodal, leur rationalité et validité sont tout à fait justifiables. L’adhésion du capitaine Algren, soldat moderne à ces valeurs montre bien que ce n’est pas une question de temps ou d’époque mais que c’est une question d’idéal et de valeurs. La morale étant universelle et étant donné que les valeurs principales des Samouraï ont pu être justifiés philosophiquement, il n’est pas invraisemblable de dire qu’elles peuvent être appliqué pour le soldat moderne. Algren dit à Katsumoto : « Qu’est ce qui peut être plus essentiel que le Bushido ? »

 

 

 

 

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