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"Sommes-nous prisonniers de notre corps ?"

Publié le 7 Janvier 2020, 10:14am

Catégories : #Philo (textes - corrigés), #Dissertations d'élèves

"Sommes-nous prisonniers de notre corps ?"

Proposition de traitement par Mlle Alice Rolfe, lycée Albert-Ier de Monaco, TES1, décembre 2019

 

            Le corps peut être la représentation d’une personne. Il peut comporter notre âme, notre sujet mais par contre, à première vue, il représente notre apparence.

Venant du mot latin “corpus”, lorsqu’on parle de notre corps, on dit effectivement que c’est le nôtre.  Ainsi, l’utilisation de la troisième personne suggère que toute l’Humanité possède son corps. Notre corps nous appartient-il donc? Si oui, ce point de vue est optimiste, car en pensant que nous possédons notre corps, nous pouvons en déduire qu’on a un contrôle total sur notre corps et les actions de notre corps. D’un côté, notre corps ferait partie du “Moi”, qui est censé durer dans le temps. Nous serons conscients de nous-mêmes, que certains philosophes croient valider par le seul fait de dire “nous sommes” ou bien “je suis”, du verbe être, affirmant notre existence et notre liberté, grâce à l’existentialisme.

D’un autre côté, il peut être vu que le “Moi” est prisonnier de cette barrière physique qu’est le corps. C’est-à-dire qu’il y a certaines contraintes qui font que le sujet, du latin “subjectum” qui signifie “ce qui est en-dessous”, ne dure pas dans le temps, et n’est pas totalement conscient de ce qu’il se passe à l’intérieur de lui-même.

Par conséquent, existent-ils des contraintes qui supposent que le corps emprisonne l’existence du sujet, le contraignant d’être indépendant? Ainsi, lorsqu’il n’existe pas de contraintes, nous validons notre existence indépendante en étant conscients de tout ce que l’on fait. Mais, nous sommes déterminés par notre corps qui ne dure pas, et nous ne pouvons pas être assez forts pour résister à notre corps naturel.

 

            Dans un premier lieu, le sujet peut être conscient de tout ce qu’il se passe à l’intérieur de lui-même. Il contrôle son corps, et a une conscience transparente. En effet, s’il a une conscience, le sujet sait tout. Le mot conscience provient du latin “cum sire” qui signifie “avec savoir”. Ce qu’on pense et ce qu’on sait nous définissent. Nous sommes indépendants de nous-mêmes. Sur cette idée, le cogito de Descartes, qui signifie l’ensemble des représentations dont nous sommes conscients, peut être cité. Dans son Discours de la méthode (1637), le philosophe Descartes énonce que si l’on doute, c’est qu’on existe. Il valide le dualisme cartésien, un dualisme entre empirisme et matérialisme, dont l’emprise signifie que le seul monde qui existe est celui dans “ma tête”. Donc, il y a un équilibre entre le corps et l’esprit.

Ainsi, selon Descartes, si l’on pense c’est qu’on est, du verbe être. Il affirme cela avec sa phrase célèbre: “je pense donc je suis”.

Encore, le cogito dure dans le temps, et il y a une certaine forme de réflexivité. Par conséquent, le corps n’emprisonne pas le sujet, ce dernier est libre.

De suite, Emmanuel Kant propose que le fait de dire “je” montre bien le fait que le sujet décide. Par exemple, dans son Anthropologie du point de vue pragmatique, il donne l’exemple de l’enfant Charles. Ce dernier, au lieu de se référer à lui-même à la troisième personne, commence à utiliser la première personne. Il devient donc lui-même et conscient qu’il existe une vraie conscience en lui. Donc, grâce à ces deux exemples, l’hypothèse que nous sommes libres grâce à nos pensées seules montre que nous pouvons être indépendants de notre corps.

 

 

            D’un autre côté, on peut prendre l’exemple de la sociologie que l’être humain n’est pas totalement conscient de ses actions, alors que peut-être il le pense. C’est en effet la société qui le détermine car il y a cette pression d’être “l’idéal” aux yeux de notre société et des autres, mais ceci ne dure évidemment pas dans le temps, alors que le sujet de Descartes suppose ce dernier.

Par exemple, Pascal, dans son texte “Qu’est-ce que le Moi?” tiré de son ouvrage Pensées, réduit le sujet à des apparences physiques, matérielles. C’est le corps physique qui détermine qui on est, donc la personne en soi est plus ou moins emprisonnée dans son corps, sauf que ce n’est pas totalement vrai car on peut changer notre apparence, pour le meilleur ou pour le pire. Ainsi, Pascal suppose qu’on est aimé selon si on est “beau”. On parle de ce qui est seulement à la surface, et non l’être en soi. Cela fait penser au matérialisme. Pascal donne l’exemple de son temps lorsque la petite vérole, qui se manifeste par une éruption de boutons, avait surgit et était très contagieuse. En effet, il démontre un homme qui était auparavant beau mais qui a été frappé par cette contagion et n’est plus aimé à cause d’avoir été défiguré par cette maladie.

De plus, Karl Marx a exprimé que “ce n’est pas la conscience qui détermine notre existence , mais notre existence sociale qui détermine la conscience”. En effet, Pour Marx, la formation du “Moi” est issue de notre environnement, de notre socialisation. Elle ne vient donc pas forcément de nous-mêmes, mais de déterminations extérieures. L’individu est conditionné par son environnement.

Par conséquent, l’individu n’est pas proprement lui, son existence est déterminée par ce qui est autour de lui. Donc, il n’est pas totalement prisonnier de son corps.

 

            Dans une partie finale, nous pouvons être en partie prisonniers de notre corps. Nous essayons de résister au corps biologique, mais nous ne pouvons pas vraiment. En effet, on parle de corps biologique lorsqu’on parle de pulsions ou de désirs que nous ne pouvons pas contrôler, comme si notre corps était son propre sujet. Le sujet n’est donc pas conscient de tout ce qu’il se passe à l’intérieur de lui-même car il y a des déterminations naturelles. De plus, il faut distinguer les désirs conscients des désirs du corps biologique. Effectivement, désirer, du mot “desiderare” en latin signifie “manque” et “astre”. C’est-à-dire qu’il y a un manque qui doit être satisfait que l’on ne peut pas contrôler.

Donc, Freud, dans sa Métapsychologie (1915), donne l’instance du rêve comme un contenu de la conscience qui nous échappe. Notre corps n’est pas complètement conscient de la raison derrière un rêve incompréhensible. En effet, c’est notre inconscience qui nous parle, pour révéler un désir masqué. Cela peut être un désir inapproprié. Ainsi, il y a la maîtrise qui est une étape intermédiaire menant au dépassement; on renonce au désir car on risque peut-être une punition, donc on est conscient que ce n’est pas un désir moral. Selon Pascal dans ses Pensées, il faut distinguer les désirs et leurs degrés de satisfaction. Notre conscience renonce donc à ce désir immoral, alors que notre inconscience peut aller jusqu’à révéler ceci. Il faudrait donc que l’individu essaye de se libérer de ce fait ou de cette pulsion inconnue en le démasquant. Par exemple, dans la réalisation d’Hitchcock, “La Maison du Docteur Edwardes”, le personnage du “Docteur Edwardes" ne sait pas qui il est réellement, il est à l’ombre de son identité. Sa vraie personne est emprisonnée dans son corps et il peut seulement la démasquer en se libérant de son complexe de culpabilité. En effet, il a, sans faire exprès, poussé son frère à sa mort à un très jeune âge, mais sa conscience l’a fait oublier cet événement car elle se sentait extrêmement coupable.

Par conséquent, un individu peut bien être prisonnier dans son corps à cause de pulsions ou de désirs inappropriés qui peuvent devenir incontrôlables.

 

            Pour conclure, il n’existe pas seulement le corps chez un individu, une personne. On peut dire que le corps n’est que seulement matériel et rien de plus. Effectivement, l’être humain a une âme et une conscience. En revanche, il existe aussi une inconscience qui peut se manifester à tout moment. L’individu n’est donc pas totalement conscient de ce qu’il se passe à l’intérieur de lui-même, à cause des désirs inconscients de son corps. Le corps a donc un certain pouvoir sur le sujet, il peut donc emprisonner la conscience.

On peut terminer sur cette hypothèse pessimiste Grecque: “Soma Sema”, qui signifie que le corps est le tombeau ou la prison de l’âme. Le corps peut transporter une âme “morte”, inconsciente et emprisonnée.

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