Celui qui lit rapidement la 4ème de couverture de l’ouvrage de Xavier Moreau pourrait penser tenir entre les mains un “essai-fiction” au service de la didactique et de l’initiation à la philosophie — comme la préface de Francis Métivier tend à le faire accroire.
Las, il n’en est rien, l’opus en question n’étant qu’un roman sommaire, à tous les sens du terme, mettant en scène une classe d’élèves — inscrits dans la spécialité Humanités Littérature Philosophie (HLP) chère à la nouvelle réforme du lycée — face à leur professeur de philosophie, dans un établissement privé.
Après une présentation sans intérêt des protagonistes et des lieux, le lecteur a droit à quelques chapitres qui mettent en exergue le dialogue et la méthode spécifiques déployés par le pédagogue afin de rendre accessible aux néophytes une discipline réputée ardue sinon hermétique.
Outre que ce premier trimestre d’enseignement romancé n’est guère captivant, le nerf de la guerre portant sur quelques sujets dissertatifs appréhendés sous l’angle de la problématique et de la dialectique censées en rendre compte, on déplore que l’ensemble, des plus poussifs, n’ait pas bénéficié de la relecture éditoriale minimale attendue : les fautes de ponctuation, d’orthographe, de grammaire et autres coquilles constellent toutes les pages (il n’est pas jusqu’au nom du professeur Weir qui ne varie, et ce n’est pas un clin d’oeil à la célèbre querelle platonicienne entre Hermogène et Cratyle au sujet du statut ontologique des noms) au point que la tenue de l’ouvrage, même si ce dernier part assurément d’une intention louable, semble plus préjudiciable qu’autre chose à la discipline philosophique dont la rigueur formelle demeure, qu’on le veuille ou non, l’un des critères majeurs.
Expédier “l’allégorie de la caverne” de Platon mâtinée de vagues références aux films Matrix ou The Truman Show apparaît il est vrai tout sauf convaincant. Les dialogues téléphonés entre les uns et les autres au sein de ce lycée traduisent sans nul doute une certaine vérité des conditions de l’enseignement tel qu’il se pratique de nos jours en France mais, si l’on tient à légitimer les vertus de “la classe inversée”, il existe des essais aboutis et éclairants qui nous semblent plus estimables et féconds, que l’on soit un professionnel de l’éducation ou non.
Xavier Moreau, qui cherche céans à multiplier diverses pistes herméneutiques, n’en fraye véritablement de facto aucune et l’on peut se demander s’il ne s’expose pas, aux prises avec le démagogisme, à être lui-même victime de ce que dénonçait Sacha Guitry, qu’il cite dans ces pages : “Quand on veut plaire à tout le monde, on finit par plaire à n’importe qui.”
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louis taillandier
Xavier Moreau, Le Bonheur ou la Vérité ? Impressions de rentrée en terminale, L’Harmattan, collection Rue des écoles, juillet 2020, 224 p. — 20,50 €.
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