Une fine présentation de l’influence du peuples des airs sur celui de la terre
Quels motifs étaient valables pour suivre un faucon jusqu’à son lieu de nidification, au Nord du cercle polaire ? Fidèles au cadre des romans de "nature writing" qui est leur marque de fabrique les éditions Gallmeister proposent un surprenant roman avec En vol.
Nous voici dès l’orée de ce dense opus installés aux manettes d’un vieux coucou, entre un pilote sexagénaire sur le retour, vétéran de la seconde Guerre Mondiale, et un jeune naturaliste fanatique un rien naïf. Tous deux ont décidé, presque sur un coup de tête amateuriste, de poursuivre les recherches qu’ils menaient pour le compte de l’armée à propos de la migration des faucon pélerins d’Amérique.
Leur ambition : pouvoir suivre d’un bout à l’autre, ce que nul n’a jamais fait, le flux migratoire d’un faucon, la gente Amélia, équipé d’un émetteur-radio, du Golfe du Mexique jusqu’à l’Alaska !
Grâce à l’écho de la sonde dont les pulsations, telles celle d’un coeur en train de battre, rythment le roman, nous suivons à la trace, loin de la petitesse de la civilisation humaine, le faucon qui est de fait le véritable héros du récit. Mais ce périple ornithologique aérien n’est pas qu’une balade de santé car il est aussi le survol écologique - les rapaces n’étant pas toujours ceux que l’on croit - des abus chimiques en agriculture et des trafic de drogues de toutes sortes dont se rendent coupables les individus qui ne lèvent jamais la tête vers le ciel. En vol est aussi une fine présentation de l’influence du peuples des airs sur celui de la terre, l’auteur rappelant notamment que le faucon a joué un rôle décisif dans la constitution de la chasse et de la littérature des aristocrates en Europe, l’art du roman devant beaucoup à un manuel de fauconnerie, De arte venandi cum avibus ( "De l’art de chasser avec des faucons"), dû à l’empereur allemand Frédéric II et achevé en 1250 par son fils le prince Manfred et alors traduit en plus de 10 langues : ...jusqu’à l’apparition des armes à feu à la fin du XVIIe siècle, la chasse avec des oiseaux de proie ne fut égalée, par l’intensité des passions qu’elle suscitait, que par la religion.
Notes scientifiques, traité d’éthologie aviaire anarchiste et carnet de voyage épique alternent ainsi sur fond de paysages extaordinaires pour former une ode au rapprochement entre l’homme et l’animal et militer pour la préservation des espèces. En vol a d’ailleurs été classé par le New York Times comme l’un des cent meilleurs livres de l’année 2004 et devrait être bientôt adapté au cinéma par Robert Redford, qui en a acquis les droits.
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frederic grolleau
Alan Tennant, En vol (trad. Jacques Mailhos), Gallmeister, 2008, 406 p. - 25,00 euros | ||
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