L’étonnante dystopie d’un univers antiplatonicien où les hommes errent sans le soleil de leur passé.
L’histoire
En 2142, la civilisation de la planète a été détruite par la guerre, les catastrophes écologique en série et la pollution mais les survivants qui maîtrisaient la technologie ont construit une ville où la nature est restituée : Ecoban. L’énergie de celle-ci provient de la pollution environnante(alors recyclée en technologies de pointe), notamment celle de la ville voisine de Marr, immense bidonville peuplé de vagabonds et de rebelles et riche en main d’œuvre, que les habitants d’Ecoban envisagent de détruire afin d’emmagasiner encore plus de produits polluants.
Un seul homme, aspirant seulement comme tous les Marriens, à retrouver le bleu du ciel, se dresse contre Ecoban : Shua, le rebelle masqué, parvient ainsi à s’infiltrer dans la tour Delos, cœur énergétique de la cité, qui contrôle les machines d’Ecoban dans l’intention de dynamiter la forteresse. C’est en poursuivant cet intrus que Jay, jeune femme policier Ecobane, découvre qu’il s’agit de son amour d’enfance qu’elle croyait mort...
Reste à savoir si les anciens amants, à la veille d’un nouveau monde, pourront s’allier ou devront se combattre.
Tonnerre écologique
Dans cet univers le ciel est toujours empli de nuages et la pluie ne cesse de tomber, ces donneés atmosphériques et météorologiques particulières installent d’emblée dans cet imposant film d’animation un climat à mi-chemin de Black Rain et de Seven. La guere et la catastrophe écologique globale ont amené les survivants de cette pluie, réfugiés dans les cités-rochers telle Ecoban, à ne tirer leur subsistance que de la pollution ambiannte. Mais les dirigeants d’Ecoban s’inquiètent car cette polution, précisément, est en voie de disparition, ce qui entraînerait à court terme la perte de leur propre pouvoir.
Loin d’appécier le retour du ciel dans la vie de chacun (comment ne pas songer à la bulle martienne de Total Recall ? - de Mars à Marr la conséquence est bonne...), ils décident de « brûler » la cité de Marr pour se nourrir de la pollution ainsi provoquée. Une solution qu’entendent bien écarter les Marriens, dévoués à l’entretien du sytème Delos, et notamment Shua, éternellement en quête de Gibraltar parce que le ciel y serait bleu, une couleur qui lui tient d’autant plus à coeur qu’il l’a aperçue dans son enfance aux côtés de Jay travaillant désormais au service d’Ecoban.
L’histoire, un brin Romeo et Juliette écolo-new age, un chouia Mad Max au pays des nuages toxiques, on a tenté de le faire comprende, n’a rien d’original. Le scénario aux personnages caricaturaux est certes simpliste (certains le diront même sans doute indigent) et ce n’est pas là le motif principal qui invite à visionner ces « Merveilleux jours » : ce qui fait la force de ce film coréen où s’intégrent en parfaite osmose la 2D et la 3D, c’est justement la qualité et la beauté poétique incroyables des images.
Et si l’on doit en mettre certaines en exergue, ce seront surtout, outre un final digne d’un space opera SF, la magnfiique scène du combat devant les vitraux de l’eglise ou encore les superbes courses de motos sous la pluie dans la lueur blafarde des phares trouant l’obscurité où se mesure le climat oppressif du film.
Le Grand noir
Atmopshère, vous avez dit : atmosphère ? Alors que l’on attend des scènes d’action fracassantes et spectaculaires, le réalisateur Kim Moon-Saeng s’amuse dans de longs plans sur un immense champ d’éolienne, qui ne fonctionnent plus. Et laisse chacun imaginer, entre nostalgie verte et opaque mélancolie, la tristesse d’un pays où le vent n’existe plus. Wonderful Days est l’étonnante dystopie d’un univers antiplatonicien où les hommes, sans le soleil de leur passé, sont condamnés à errer tels des fantômes sans ombre.
Le traitement visuel atteint il est vrai ici une forme de perfection - quand bien même on n’est pas encore, reconnaissons-le, dans le grain somptueux de Final Fantasy - où se marient avec une rare élégance la poésie et la fantaisie. Caractérise ainsi le film une sobre opposition entre la richesse technique et l’épure visuelle, ce qui atteste d’une singulière maîtrise de l’espace non plus opposé à mais touchant au vide. On n’entend pas signifier par là seulement que les personnages 2D sont bien insérés dans l’univers 3D (photo réaliste) des décors, ni que les prises de vues réelles au travers d’un remarquable travail sur la profondeur de champ sont vertigineuses, mais que le rendu du design et la qualité des textures sont exceptionnels.
Paradoxalement, cette qualité de l’animation qui frise le maniérisme - sur ce point les Coréens rivalisent sans peine avec leurs homologues japonais - est à contre-emploi puisqu’elle contribue (inconsciemment ou non, telle est la question) par son faste à rendre quasi attractif ce monde censé illustrer un futur peu enviable alors qu’on n’a qu’une envie : se plonger dans le bleu-gris éteint(-celant ; étincelant) d’Ecoban : tout est ainsi mis en oeuvre,à la différence de Mononoke Hime ("Princesse Mononoke") d’Hayao Miyazaki, pour que la perfection du formalisme graphique démente de facto la gravité de la thèse à charge écologique.
Le sens de la critique politique paraît en pâtir par conséquent, ce qui n’empêche, on se permet d’y insister, que ce film (ayant tout de même reçu le grand prix Anim’arts du Festival du Film Fantastique de Gérardmer 2004), est très beau visuellement. Egalement il est, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce genre de productions cédant à l’éclatement bariolé, très cohérent en ce qui concerne le choix des éléments et des couleurs. Quiconque contemple sur son écran les ponts et chaussées, les plate-formes et les cylindres digitaux d’Ecoban, face aux misérables architectures marriennes grises striées à la Europa de Lars Von Trier, ne nous démentira pas, tant la maîtrise plastique de Kim Moon-Saeng en impose.
Volumes et épaisseurs, pénombres halorées et filtres de lumière louchent à l’envi sur les renommés Akira ou Ghost in the Shell. L’envolée - qui n’est que lyrique tandis qu’on la souhaitait adulte - certes n’aura pas lieu ici, tout au plus aura-t-on droit à un transport enivrant. Le dessin, aussi romantique et precis soit-il, demeure prisonnier d’un manque de conceptualité mais il ravira les amateurs d’esthétique largo sensu.
Tous ceux aussi, on aurait tort de l’oublier in fine, qui ne sont pas indifférents à la mise en images (de synthèse) du génocide d’un peuple, de la nocivité de l’industrie et de l’esprit de sacrifice. Par là, dans la légéreté du début (de la fin de notre Histoire) qu’il inaugure et explore, Wonderful Days s’impose, au-delà de tout manichéisme facile, comme une oeuvre plus ambitieuse sinon « retenue » (on songe par exemple à la lenteur et au manque de scènes d’actions qui faisait la force du Blade Runner de Ridley Scott) qu’on a bien voulu le dire.
frederic grolleau Wonderful Days Producteur : Kay Hwang & Lee Kyeong-Hag Réalisation : Kim Moon-Saeng Directeur : Kim Moon-Saeng Scénario : Kim Moon-Saeng & Park Jun-Young Dir. artistique : Jung Yoon-cheol & Lee Suk-Young Dir. animation : Yoon Yeong-ki Musique : Sim Jae-Il & Won Il Zone : 2 (Europe) Format cinéma : 1.77 Format vidéo : 16/9 compatible 4/3 Couleur : PAL Vidéo : 8.15 Mb/sec Audio : 448 Kbps Face : Simple face / double couche : DVD-9 Boitier : Digipack Disponibilité : 26/01/2005 Editeur : Fox Pathé Europa Sous-titre(s) : Français Image Format d’image : 16/9 LB Bonus : Making-Of (55 minutes) Interview du réalisateur 6 Galeries de photos Clip Musical 3 Bandes-Annonces Prix : 30, 00 €.
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