Ou quand chacun devient un pion sur le moderne échiquier du mal politique et économique !
Complot ou parano ? C’est la question qui ne manquera pas de venir tarabuster le lecteur une fois Les arcanes du chaos refermé. Si Maxime Chattam, réputé pour sa noire trilogie du Mal (voir articles liés) sait y faire dès qu’il s’agit de descendre dans les abysses de l’âme humaine (en particulier celle des serial killer, psychopathes et autres détectives privés hors normes), il ne se débrouille pas mal non plus, c’est le moins qu’on puisse dire, quand il faut pousser un cri d’alarme à l’encontre des oligarques, hommes politiques, grands industriels et financiers, qui font mumuse avec la planète et les êtres humains... juqu’à bientot tout faire péter dans un grand boum qui pourrait bien coïncider avec l’un des grands derniers attentats ayant marqué notre époque.
Mais comme ce jeu, mortifère et liberticide (à l’instar des lois politiques et économiques auxquelles nous sommes tous soumis, glisse in fine l’auteur), dure depuis des lustres, il n’est pas impossible non plus que l’on puisse revisiter l’histoire depuis quelques siècles afin de mettre en exergue des coïncidences troublantes - l’extrême-droite américaine n’en sortira pas grandie. Serions-nous donc de simples pantins que manipulent à leur guise une poignée d’olibrius omnipotents s’amusant à se jouer de nos existences comme de vulgaires pions, à la façon dont Dan Simons décrivait dans son oeuvre éponyme "L’échiquier du Mal" à quoi se réduirait la vie étatique de nos jours ?
Yael, l’héroine des Arcanes du chaos, l’apprendra à ses dépens, cette trentenaire parisienne lambda bien dans la norme et dont la vie bascule soudain quand des ombres se mettent à apparaîre dans les miroirs qu’elle croise et à lui envoyer des messages aussi énigmatiques qu’ésotériques afin de lui faire prendre conscience de la manipulation de la vérité et de l’information dont elle est victime depuis toujours...
Sur cette prémisse du premier chapitre, le roman s’emballe à fond les manettes et plonge le lecteur dans une course contre la montre des plus cinématographiques où alternent courts chapitres nerveux à souhait et informations objectives en contre-champ grâce aux messages du blog de Nasir, l’un des protagoniste du scénario. Comme d’habitude avec Chattam, on en prend plein les mirettes (nul ne s’en plaindra), mais cette fois-ci le romancier qui publie désormais chez Albin Michel ajoute un point de vue plus personnel, plus engagé sur l’Histoire, trimbalant ses personnages d’Herblay, en banlieue parisienne, à New York. Ce à quoi il faut ajouter un traitement particulier réservé au verre, au miroir - à la transparence de manière plus générale, ce qui nous fait songer à notre ami Ayerdhal -, bref, aux faux-semblants qui dissimulent souvent les vrais fondements et racines des choses et des êtres. C’est-à- dire du monde. George Orwell, reviens, les hommes sont devenus fous !
Une entreprise de dessillement du regard qui culmine avec une solide documentation sur le rôle des sectes, Illuminati et autres Skull & Bones, dans le façonnage des billets de banque américains, sur la traçabilité totale des ciotyens due à l’implantation en pleine recrudescence des puces électroniques type RFID et des codes barres quasi diaboliques : franchement, il y à la de quoi se faire plaisir ! Lorsqu’on a rencontré Maxime Chattam, humble, généreux et calme au possible (si,si - il ne se trémousse même pas sur son fauteuil), on a voulu lui faire un compliment en lui disant qu’il était un Dan Brown à la française. A la réflexion, en se penchant sur la pure chronologie éditoriale, il faut observer que c’est plutôt Dan Brown qui est un Maxime Chattam à l’américaine.
Vous qui venez de lire cette critique sur écran d’ordinateur, vous êtes déjà sous surveillance.
frederic grolleau
Maxime Chattam, Les Arcanes du Chaos, Albin Michel, 2006, 458 p. - 22,00 euros.
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