fredericgrolleau.com


Le plaisir & le mensonge: Aristote, "Ethique à Nicomaque", livre X (sections techno)

Publié le 9 Février 2020, 13:31pm

Catégories : #Philo (textes - corrigés)

Le plaisir & le mensonge: Aristote, "Ethique à Nicomaque", livre X (sections techno)

"Les uns identifient le bien au plaisir ; d’autres, au contraire, l’assurent foncièrement mauvais ; les uns, sans doute par conviction intime, les autres, à la pensée qu’il vaut mieux, vu les conséquences pour notre vie, le rejeter, vaille que vaille, au nombre des vices : la foule n’est déjà que trop portée à s’asservir aux plaisirs, mieux vaut donc l’engager sur la voie opposée : puisse-t-elle atteindre un juste milieu. Mais c’est bien mal raisonner. Car en matière d’affections et d’actions les paroles ont moins de valeur que les actes, et lrosqu’elles sont en désaccord avec les données de la sensation, on les rejette, et, avec elles, la part de vérité qu’elles contiennent. Qu’un jour on surprenne le censeur des plaisirs à en rechercher un, on en concluera que tout plaisir mérite d’être poursuivi, car il est des distinctions que n’opère pas la foule. Il est donc préférable de toujours dire la vérité, en morale comme en science ; seules les paroles véridiques ont force oratoire : conformes au réel, elles peuvent inciter ceux qui les entendent à y conformer leur vie."

Aristote, Ethique à Nicomaque, livre X.

Questions :

Compréhension :

1) A quel problème répond le texte ?

2) Quelle est la thèse d’Aristote ?

3) Quelles sont les étapes de son raisonnement ?

Réflexion :

La thèse d’Aristote vous semble-t- elle juste, contestable ou dangereuse ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Objectif : Exploiter un texte pour traiter un problème philosophique.

Thème : vérité, bien, mal, plaisir, actes et discours… registre éthique

Style : Le style est simple et dénué d’artifice littéraire : il laisse  ainsi émerger la structure du raisonnement. Quelques conjonctions viennent baliser les virages de l’analyse.

Indices : « d’autres au contraire ».. polémique  « mais », « car », « donc »…argumentation

Nature du texte : polémique, argumentatif
Combat : critiquer la thèse selon laquelle l’intention morale justifierait le recours au mensonge.

1) PB : est donc moins la nature du plaisir, qui est le contexte, que celui de la valeur de la vérité. Faut-il toujours dire la vérité  ou bien y a -t-il une exception recevable ?  Peut-on mentir à quelqu’un pour son bien ou bien ne faut-il jamais transiger avec la vérité ? L’argumentation portera sur ce point.

Mais la question se pose parce qu’Aristote cherche ce qui peut inciter les hommes à faire le bien, à devenir vertueux. Comment évaluer justement le plaisir ? L’enjeu est d’abord éthique et concerne l’éducation morale ; mais il est aussi philosophique  parce qu’il  critique deux manières de mal raisonner. Il montre ainsi que l’idée qu’on se fait du bien comme les discours sur le bien ne sont pas sans incidence sur la vie morale effective. Nous sommes donc responsables de notre bonheur.

Le pb d’Aristote est aussi le nôtre :
- D’un côté, si je mens, je ne respecte pas la règle morale, mais c'est en vue de produire le bien. Le calcul semble intelligent puisque la transgression de l’interdit du mensonge n’est pas égoïste mais en vue d’un bien supérieur. Dire la vérité serait une preuve de rigidité morale et trahirait une incapacité à prendre en compte la diversité des situations humaines.
- D’un autre côté, si je commence à mentir, même dans une bonne intention, cela produit des effets pervers. Je jette un trouble chez tous ceux qui ne comprennent pas la stratégie du mensonge. Je deviens condescendant au lieu de laisser la foule juger par elle-même. Il serait donc préférable quand on veut enseigner la moralité de ne pas s’octroyer des exceptions à la règle.

2) Où se situe Aristote ?

Thèse : Ce qui importe c’est d’être juste, il vaut mieux être exemplaire : dire ce qu’on fait et faire ce qu’on dit. Il faut donc dire la vérité et être cohérent. ( indice : « il est donc préférable »)

3) Cherchons ce qui est juste, contestable et dangereux chez l’auteur.

Ici, chercher l’argumentation

Intro : Deux erreurs à ne pas commettre : exagérer la valeur du plaisir ou au contraire le dévaloriser. Les deux attitudes vont s’avérer contestables et dangereuses. C’est un mauvais calcul que de mentir en vue du bien. Les censeurs mentent pour préserver la liberté de la foule (qui a tendance à s’asservir...), mais le juste milieu devient un objectif trouble.

Le cœur de l'argumentation :
1) L’erreur de raisonnement est de ne pas avoir tenu compte de la manière dont la foule juge. Je juge davantage aux actes qu’aux discours. Ainsi, si je sens que le plaisir est bon, je ne saurai me persuader du contraire, et je risque de perdre confiance dans les discours moraux.

2) Un exemple vient appuyer l’argumentation. Si les censeurs s’autorisent ce qu’ils interdisent à la foule, alors le discrédit est jeté sur la morale toute entière. La foule manque de subtilité ( une stratégie n’est pas lisible dans l’immédiateté de la sensation) et n’aimant pas qu’on lui mente fera la sourde oreille et jettera le bébé avec l’eau du bain.

Ainsi Argument principal : une contradiction entre les actes et les discours est dangereuse pour la vie morale. La foule a besoin de clarté, mais attention la foule n’est pas forcément capable de bien juger aux yeux de l’auteur.

Thèse de l’auteur :
1) déduction : soyons exemplaires puisque seule la vérité peut convaincre de tempérer nos plaisirs et de poursuivre le bien. Il vaut donc mieux ne pas mentir. Aristote en fait même un principe en étendant à tous les contextes moraux et scientifiques.

2) nouvel argument : reformulation de l’argument principal et généralisation. Il vaut mieux convaincre que persuader, s’adresser à la raison qu’aux passions. L’éducation morale est plus efficace quand le maître est exemplaire, c'est-à-dire cohérent, quand il vit en accord avec ses principes.

 

 source : http://lairphilo.over-blog.fr/article-32565694.html 


 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Commenter cet article