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Le désir chez Jean-Honoré Fragonard, "Le verrou" (1777)

Publié le 6 Février 2020, 08:36am

Catégories : #Exercices philo

Le désir chez Jean-Honoré Fragonard, "Le verrou" (1777)

Analyser le tableau soumis (noms du peintre et de l'oeuvre non fournis) en vous appuyant sur le cours dédié au désir et en formulant une problématique philosophique (35 mn)

Proposition de traitement par Mlle Claire SZYMCZYSZYN, TES1, lycée Albert-Ier de Monaco, 20 janvier 2020

La toile soumise à notre étude présente un homme et une femme debout au pied du lit. Le tableau met en avant deux personnes en utilisant un décor simple. Le contraste de couleur attire l’œil sur le couple. Dans le premier plan, à droite, un rayon lumineux éclaire les personnages. La femme est vêtue d’une longue robe dorée, sa coiffure laisse imaginer qu’elle appartient à un certain rang social. L’homme, habillé plus sobrement, retient la femme dans ses bras. Cette dernière semble attirée par une pomme.
Les deux personnages sont proches physiquement mais leurs volontés paraissent les éloigner. Les rideaux au-dessus du lit son rouges, une couleur chaude, symbolique d’amour et de passion. En effet, la gestuelle des personnages évoque des volontés opposées. L’homme, sur la pointe des pieds et levant sa main au ciel semble vouloir monter. Cette ascendance peut traduire une volonté de vouloir s’élever socialement car sa tenue laisse penser que c’est un homme issu d’un milieu populaire, mais nous pouvons également supposer qu’il s’étire vers le haut, en espérant toucher le ciel, rejoindre les cieux. Sa posture semble comparable au tableau de Michel Ange, La création d’Adam, peint lors de la Renaissance. La distance physique entre le Ciel et le personnage n’empêche pas sa volonté de vouloir monter.

Par son étymologie, désir, vient du latin desiderare, qui signifie un astre manquant. L’homme cherche donc à retrouver l’astre perdu. En revanche, la femme se rattache au sol, elle est attirée par la terre. La pomme posée en bas du lit, à gauche, peut être assimilée à celle biblique d' Adam et Eve. La femme semble vouloir se diriger vers la pomme représentant le désir du fruit défendu. L’interdit attire, la femme désire l’impossible. Comme dans La Bible, le fruit est visiblement interdit et symbole du désir mais il ne cesse d’attirer le désir humain. L’homme, quant à lui, essaye de la retenir, ne voulant pas commettre l’irréparable qui avait provoqué la mort de l’Homme, selon le texte d’Adam et Eve.

Sur le tableau, l’homme est déterminé à se rapprocher des cieux. En effet, sa main est posée sur le verrou de la porte, ce qui laisse penser qu’il veut ouvrir la porte qui mène au Paradis. L’homme ne veut pas se soumettre aux désirs terrestres car il sait qu’ils sont infinis comme évoqués par Platon dans le « tonneau des Danaïdes » du Gorgias. L’Homme ne sera jamais satisfait complètement à l’image du seau qui ne sera jamais plein entièrement. L’homme a une approche épicurienne en modérant ses désirs pour atteindre la sagesse afin de s’élever.
Par sa tenue rayonnante, la femme nous laisse penser qu’elle souhaite la gloire et la richesse. Ces désirs artificiels, selon Epicure, dans La lettre à Ménécée, la condamnera à être dans un état de manque. D’une part, pour l’Homme le désir connote une dimension positive puisqu’il désire une chose pour laquelle il va mobiliser son imagination et son énergie pour l’obtenir. Le désir le met en mouvement. D’autre part, le désir chez la femme amène une dimension de manque. L’homme a compris la vision de Schopenhauer dans Le monde comme volonté et comme représentation rédigé en 1818, qui montre que la volonté n’est que souffrance car le désir est partout et conduit à l’état de souffrance, c’est pour cela qu’il retient la femme voulant satisfaire son désir de manger la pomme. 

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