La république de Platon est une cité utopique. Dans La République, le philosophe passe par l’intermédiaire de Socrate pour défendre sa conception de l’État idéal. Celui-ci doit rechercher la justice, qui est un bien en soi, désirable par soi. Le célèbre maître de Platon utilise un détour méthodologique (aller du macrocosme au microcosme) pour sa démonstration : il suffit de regarder ce qu’est un État juste pour comprendre ce qu’est un homme juste.
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La république de Platon repose sur une certaine harmonie sociale. Pour le philosophe, une société bien constituée comporte trois catégories de citoyens : les gardiens (gouvernants), les auxiliaires (guerriers) et les producteurs (tous les autres). Cette catégorisation repose sur la division quadripartite des vertus de l’âme (prudence, courage, tempérance, justice). L’État est prudent/sage grâce aux gardiens, courageux grâce aux auxiliaires, et tempérant grâce à la domination de la minorité vertueuse. « La justice (…) consisterait pour chaque classe – celle de l’homme d’affaires, celle du militaire auxiliaire, celle du gardien – à exercer ses propres activités dans la cité ; c’est cela qui rendrait la cité juste. Une cité semblait précisément être juste quand les trois groupes naturels présents en elle exerçaient chacun sa tâche propre, et elle nous semblait modérée, ou encore courageuse et sage, en raison d’affections et de dispositions particulières de ces mêmes groupes » (La République). Ainsi, la justice de la société réside dans l’harmonie des parties de la Cité. Socrate en déduit que la justice dans l’individu est l’ordre véritable dans l’intérieur, lorsque le sujet se commande lui-même. Platon le fait également plaider pour une harmonie dans l’harmonie, grâce au communisme des gardiens : communauté des biens, des femmes et des enfants, eugénisme (inspiré de Sparte), égalité entre les femmes et les hommes.
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La république de Platon est dirigée par des rois philosophes
La république de Platon est gouvernée par une élite éduquée. L’éducation des gardiens passe par la sélection et la formation par la “musique” (c’est-à-dire l’acquisition du sens de la mesure et de la régularité, qui se différencie de la pensée floue et incertaine) et par la “gymnastique” (exercices physiques, hygiène, régime alimentaire simples et réguliers), et en imprégnant l’âme de l’enfant par le sens du Bien. « Il faut (…) qu’elle [l’âme] soit restée pendant la jeunesse innocente et pure de vice, si l’on veut qu’elle juge sainement, grâce à sa propre honnêteté, de ce qui est juste » (La République). Dans le détail, l’éducation de l’élite doit également suivre différentes étapes précises. À vingt ans, les individus sont sélectionnés pour l’étude des sciences ; à trente, pour l’étude de la dialectique ; entre les âges de trente-cinq et cinquante ans, ils acquièrent de l’expérience en replongeant dans la vie sociale ; c’est à cinquante ans, finalement, qu’à lieu la sélection finale entre les « chefs », d’une part, et les « auxiliaires », d’autre part, qui sont les exécuteurs des décisions des chefs. Cette théorie du gouvernement par l’élite est une véritable réfutation du principe démocratique. Pour Platon, en effet, le gouvernement juste est forcément non public, puisqu’il subsiste toujours une irrémédiable incompréhension entre l’élite et le peuple.
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La république de Platon réunit la puissance politique et la philosophie. Alors que la démocratie est assimilée à la démagogie des sophistes, qui vont systématiquement dans le sens des passions et des illusions de la foule, le philosophe est lui capable de contempler la vérité authentique, résidant dans le ciel des Idées platoniciennes. Pour autant, Platon souhaite que seule l’élite la plus restreinte reçoive une éducation philosophique. Cette éducation consiste en l’étude de l’« idée du Bien », laquelle faisait l’objet d’un enseignement ésotérique à l’Académie de Platon. Plus précisément, la légitimité du pouvoir repose sur le contact établi avec la structure même de l’univers (le « Bien »), qui doit servir de modèle pour régler la Cité. Ayant « vu le Bien en soi, postule Platon, ils [les gardiens] s’en serviront comme d’un modèle pour régler la cité, les particuliers et eux-mêmes (…) consacrant à la philosophie la plus grande partie de leur temps, mais, dès que leur tour est venu, affrontant les tracas de la politique, et prenant successivement le commandement, dans la seule vue du bien public » (La République). Les gardiens philosophes sont ainsi des « âmes d’or »[1], car ils l’emportent sur tous les autres sur le double registre moral (souci de l’intérêt général) et intellectuel. C’est grâce à cette qualité qu’ils seront capables de mener la cité vers un bien-être stable et durable.
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[1] Cf. les quatre âges : or/argent/fer/airain.
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