En chemin vers le doute “hyperbolique”
Le Malin Génie est une hypothèse qu’émet Descartes dans son cheminement vers la vérité au moyen du doute. Ce chemin commence par le constat qu’il fait du caractère “fort douteux et incertain” des anciennes opinions qu’il a reçues dans la première partie de sa vie. Ces fausses opinions viennent en particulier des sens dont il a pu observer qu’ils étaient quelquefois trompeurs.
Descartes, constatant cela, fait une première hypothèse : s’il se trompe, c’est peut-être que le Dieu qui l’a créé – ce Dieu tout-puissant dont son esprit a “une certaine opinion” – est celui qui le trompe. Mais, ce Dieu étant “souverainement bon”, il lui semble impossible qu’il soit trompeur. Sa bonté, sa toute-puissance, font que ce Dieu ne peut l’avoir créé avec une telle imperfection qu’il soit amené à se tromper toujours.
Il émet donc une deuxième hypothèse : celle d’un Malin Génie si puissant qu’il ferait tout pour que Descartes se trompe. Il l’évoque ainsi dans la première Méditation :
"Je supposerai donc qu’il y a, non point un vrai Dieu, qui est la souveraine source de vérité, mais un certain mauvais génie, non moins rusé et trompeur que puissant, qui a employé toute son industrie à me tromper."
La supposition de l’existence de ce Malin Génie a une conséquence majeure sur le doute qu’a utilisé Descartes au commencement de sa méditation, comme il l’indique, pour “détruire généralement toutes mes anciennes opinions” (Méditation I). Avec l’hypothèse du Malin Génie, ce doute, d’abord général, va se transformer en un doute radical et universel : un doute “hyperbolique” (Descartes utilisera ce terme à la fin de la sixième Méditation).
Le Malin Génie et le Cogito
La “fiction méthodologique” (Morfaux L.-M., Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines) qu’est le Malin Génie va également avoir une importance fondamentale : assurer la première vérité identifiée par Descartes : le Cogito.
"Mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très rusé, qui emploie toute son industrie à me tromper toujours ; et qu’il me trompe tant qu’il voudra, il ne saurait jamais faire que je ne sois rien, tant que je penserai être quelque chose. De sorte qu’après y avoir bien pensé, et avoir examiné soigneusement toutes choses, enfin il faut conclure, et tenir pour constant cette proposition : Je suis, j’existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce, ou que je la conçois en mon esprit. (Méditation II)."
Nous voyons ici que le Malin Génie fait une deuxième apparition, implicite, mais reconnaissable aux qualificatifs et terme que Descartes lui attribue : “trompeur”, “puissant”, “rusé”, “industrie”. Sa fonction va être ici de lever le doute sur l’existence du sujet : si le Malin Génie peut me tromper, c’est parce que j’existe. Cette hypothèse méthodologique qu’est le Malin Génie permet à Descartes d’affirmer son existence, de participer à la fondation du Cogito (“je suis, j’existe”).
Références
Lalande : Etre mythique.
Morfaux :
Génie : Dans la 1ère Méditation, Descartes suppose « un certain mauvais génie non moins rusé et trompeur que puissant qui a employé toute son industrie à me tromper ». Par cette supposition, le doute s’approfondit en doute hyperbolique, mais n’est rien d’autre qu’une fiction méthodologique.
Hyperbolique : Dans la 1ère Méditation de Descartes, le doute prend une forme métaphysique par la fiction du malin génie (…). Le doute hyperbolique est radical et universel (…). Seul le « je pense, je suis » résiste à un tel doute.
Godin : Descartes utilise la fonction d’un « Malin Génie » c’est-à-dire d’un être supérieur et mauvais, qui s’ingénierait à nous tromper. Même dans ce cas, le Malin génie en pourrait faire autrement que nous existions car, pour etre trompé, il faut exister.
source :
https://dsirmtcom.wordpress.com/2017/07/01/le-malin-genie-descartes-meditations-metaphysiques/
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