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Hegel : la conscience et les ronds dans l’ eau ("Cours d’esthétique")

Publié le 27 Mars 2019, 13:21pm

Catégories : #Philo (textes - corrigés)

Hegel : la conscience et les ronds dans l’ eau ("Cours d’esthétique")

Pour prendre conscience de lui-même, l’homme doit se contempler dans son propre reflet. Il doit s’ « objectiver »:

« Les choses naturelles ne sont qu’immédiatement et pour ainsi dire en un seul exemplaire, mais l’homme, en tant qu’esprit, se redouble, car d’abord il est au même titre que les choses naturelles sont, mais ensuite, et tout aussi bien, il est pour soi, se contemple, se représente lui-même, pense et n’est esprit que par cet être-pour-soi actif. L’homme obtient cette conscience de soi-même de deux manières différentes: premièrement de manière théorique (1), dans la mesure où il est nécessairement amené à se rendre intérieurement conscient à lui-même, où il lui faut contempler et se représenter ce qui s’agite dans la poitrine humaine, ce qui s’active en elle et la travaille souterrainement, se contempler et se représenter lui-même de façon générale, fixer à son usage ce que la pensée trouve comme étant l’essence  (2), et ne connaître, tant dans ce qu’il a suscité à partir de soi-même que dans ce qu’il a reçu du dehors, que soi-même. Deuxièmement, l’homme devient pour soi par son activité pratique, dès lors qu’il est instinctivement porté à se produire lui-même au jour tout comme à se reconnaître lui-même dans ce qui lui est donné immédiatement et s’offre à lui extérieurement (3). Il accomplit cette fin en transformant les choses extérieures, auxquelles il appose le sceau de son intériorité et dans lesquelles il retrouve dès lors ses propres déterminations (4). L’homme agit ainsi pour enlever, en tant que sujet libre, son âpre étrangeté au monde extérieur et ne jouir dans la figure des choses que d’une réalité extérieure de soi-même. La première pulsion de l’enfant porte déjà en elle cette transformation pratique des choses extérieures; le petit garçon qui jette des cailloux dans la rivière et regarde les ronds formés à la surface de l’eau admire en eux une oeuvre, qui lui donne à voir ce qui est sien. Ce besoin passe par les manifestations les plus variées et les figures les plus diverses avant d’aboutir à ce mode de production de soi-même dans les choses extérieures tel qu’il se manifeste dans l’oeuvre d’art’. Or l’homme ne procède pas seulement ainsi avec les objets extérieurs, mais tout autant avec lui-même, avec sa propre figure naturelle qu’il ne laisse pas subsister en l’état, mais qu’il modifie intentionnellement ».

Friedrich Hegel, Cours d’esthétique (1818-1829), t. I, introduction,texte établi en 1842, trad J.-P. Lefebvre et V. von Schenk, Aubier, colt. «Bibliothèque philosophique», 1995, p. 45-46.

1 « Premièrement de manière théorique» et « Deuxièmement… par son activité pratique» ne renvoient pas à une succession. Hegel examine tour à tour deux faces de la prise de conscience de soi.


2 Par un examen intérieur de soi, la pensée trouve ce qui définit essentiellement l’humain. 

3 L’homme se reconnaît dans le monde extérieur en le transformant, en y mettant son empreinte.


4 L’homme «détermine»le monde extérieur en le  transformant. Il fait de ce monde un miroir de son humanité. Hegel considère également le travail comme un mode de constitution de la conscience de soi.

source :  https://lewebpedagogique.com/philosophie-bac/hegel-la-conscience-et-les-ronds-dans-l-eau/

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