fredericgrolleau.com


dissertation : comment trouver la problématique? (ex. le temps)

Publié le 25 Février 2019, 15:23pm

Catégories : #philo (méthodologie)

dissertation : comment trouver la problématique? (ex. le temps)

Cet article est le 2e de notre série sur la problématique en dissertation. Voir aussi : Comprendre le sujet de dissertation (1/3) et Poser la problématique (3/3).

Comprendre ce qu’est la problématique

La problématique est un problème intellectuel qui apparaît lorsqu’on définit les mots du sujet de dissertation. On la présente souvent comme un paradoxe, c’est-à-dire quelque chose qui va contre nos attentes et semble contenir une contradiction.

Chaque sujet est construit pour avoir une problématique et une seule. Elle est “cachée” dans le sujet et votre mission est de la découvrir. Une fois le problème trouvé, votre développement de dissertation proposera une solution.

On peut comparer le sujet à jeu de casse-tête où il faut séparer des pièces imbriquées les unes dans les autres. Il y a différentes pièces emboîtées : c’est les définitions. On essaie de les séparer, mais ça coince : c’est la problématique.

1. Définir les termes du sujet

Au brouillon, on liste les sens de chaque mot du sujet. À cette étape, on peut s’aider d’un dictionnaire généraliste (type wiktionnaire) et d’un dictionnaire spécialisé en philosophie. Si le sujet contient une expression courante (“désirer l’impossible”, etc.) il faut en plus lister les sens de l’expression.

Cela permet de se familiariser avec les termes du sujet et de voir quels sont les grands champs concernés (art, politique, science…). L’objectif est de n’oublier aucun des sens importants de chaque mot.

définitions de "appartenir" et "nous" écrites à la main sur du papier
Sujet « Le temps nous appartient-il ? »: voilà à quoi peut ressembler un début de brouillon

2. Garder les sens importants en philosophie

Tous les sens listés à l’étape 1 ne sont pas utiles pour une dissertation. On va réduire notre liste en gardant seulement les sens issus d’un dictionnaire de philosophie et ceux qui montrent que le sujet joue sur les mots. On supprime aussi les définitions relatives à la théorie d’un auteur ou celles qui sont trop marquées par une tradition intellectuelle.

L’objectif est d’obtenir des définitions réputées « neutres philosophiquement ». C’est-à-dire que n’importe quel philosophe pourrait accepter comme point de départ de sa réflexion, indépendamment de sa définition « personnelle ». La définition personnelle d’un auteur est une réponse, une prise de position sur un problème. Ce qu’on cherche ici est une définition « point de départ ».

En temps limité, il est conseillé de passer directement à cette étape, sans rédiger au brouillon tous les sens de chaque mot. C’est ce que font ceux qui ont déjà l’habitude de la dissertation.

définition de "temps" écrite à la main sur du papier
Sujet « Le temps nous appartient-il ? » : à cette étape on n’a gardé que les définitions de « temps » intéressantes en philosophie

3. Chercher une contradiction

L’objectif est maintenant de trouver un problème qui s’appuie sur ces définitions. En général, ce problème a la structure suivante :

Il semble impossible que [[ idée ]]. Pourtant il semble inévitable que [[ même idée ]]

La problématique nous met face à une contradiction apparente : on a l’impression que deux choses incompatibles entre elles sont vraies en même temps.

Malheureusement, il n’y a pas de méthode infaillible pour trouver cette contradiction. Mais voilà quelques idées pour y arriver :

  • comparer les différents sens d’un même terme
  • rapprocher les termes du sujet, sens par sens
  • chercher des liens logiques entre les notions
  • chercher des différences / points communs entre les notions

En bref, il faut manipuler les définitions. On doit se demander ce qu’elles impliquent, ce qu’elles supposent et quelles sont leurs relations.

Exemple de problématique

Reprenons le sujet “Le temps nous appartient-il ?”. Ici le problème vient de deux aspects du temps qui semblent contradictoires :

D’un coté, l’homme peut s’approprier le temps. On choisit quoi faire de “notre” temps, on dit “avoir” du temps. Le temps est une durée qu’on occupe comme on veut. Mieux, c’est nous qui le mesurons et qui choisissons de le découper en heures, en minutes, etc. En ce sens le temps nous appartient.

D’un autre coté, le temps nous est compté. Chaque instant qui passe est un morceau de temps qui nous est enlevé. L’homme fait partie du temps. Nous vivons dedans, mais nous n’avons aucune prise sur lui. Nous ne pouvons pas l’arrêter. En ce sens le temps ne nous appartient jamais.

On voit le problème : le temps nous appartient… et en même temps il ne nous appartient pas. Mais une bonne problématique va plus loin. Elle montre que cette contradiction a des conséquences désastreuses. Elle dramatise.

L’enjeu est de comprendre le rapport entre le temps et nous-même. Car si le temps ne nous appartient pas, c’est notre existence elle-même qui nous échappe. Pour que notre existence soit bien la notre, il faut pouvoir en faire ce que l’on veut. Elle doit nous appartenir.

Les erreurs à éviter

Ajouter / enlever des termes au sujet. La problématique émerge des mots du sujets et de ceux de leurs définitions. Il ne faut pas ajouter de notions extérieures ou supprimer des notions présentes. Le sujet “Peut-on croire la vérité ?” n’est pas “Faut-il croire la vérité ?”.

Utiliser des synonymes. Il faut coller aux mots exacts du sujet et ne pas s’en écarter. Un sujet sur la “société” n’est pas un sujet sur la communauté, le groupe ou même l’État. Si vous cherchez le problème loin des mots du sujet, vous aller le rater.

Choisir un problème plus large que le sujet. Le sujet fournit un contexte : il sous-entend que certaines questions sont déjà résolues. Par exemple “Pourquoi être moral ?” suppose que la définition de “morale” est déjà connue. Le problème n’est donc pas “Qu’est-ce que la morale ?”. Ce genre de question est plus large que le problème que vous cherchez.

Choisir un “plaradoxe”. Évitez les “plaradoxes” : les faux paradoxes qui tombent à plat. Il s’agit de questions dont la réponse est évidente, parce qu’elles ne correspondent pas à un vrai problème. Exemple : “Comment les besoins peuvent-ils être différents selon les gens ?” ; “Comment la définition de science peut-elle être aussi différente de la pratique des sciences ?”.

Mais si je ne trouve pas la problématique ?

Pas de panique. Même s’il n’y a qu’une seule “bonne” problématique, les correcteurs acceptent quand même d’autres problématiques. Il s’agit de problèmes proches ou de problèmes secondaires qui sont considérés comme valables.

Au lycée, les professeurs sont bienveillants : ils savent que la dissertation est un exercice difficile et ne vous en voudront pas ne pas trouver LE problème. Plus tard dans les études, c’est différent. En fac de philo, on attend de vous de trouver l’unique problème central lié au sujet.

S vous n’êtes pas sûr que le problème que vous avez trouvé est le bon, demandez vous :

  • est-ce que je peux expliquer clairement à quelqu’un d’autre où se trouve le paradoxe ?
  • est-ce qu’il est lié directement aux définitions des mots du sujet ?
  • est-ce que le problème est solide ? est-ce qu’il me semble difficile à résoudre ?
  • est-ce que d’autres étudiants ont trouvé le même problème que moi pour ce sujet ?

À lire aussi : Comment poser la problématique en introduction ? (conseils de rédaction pour bien expliquer sa problématique)

source : 

https://dicophilo.fr/dissertation/comment-trouver-problematique/

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Commenter cet article