Réalisé par Ericson Core (Invincible), surtout connu pour être le directeur de la photographie de Fast and Furious (2001) et Payback (1999), le remake de POINT BREAK, à défaut d’être un bon film, joue sur la vague d’une philosophie pro-écolo passionnante car pleine de contrariétés. Essayons rapidement de passer en revue tous les défauts du film pour s’occuper de ce qui nous intéresse, ou du moins, de ce qui peut être intéressant dans ce genre de film, c’est-à-dire son idéologie un peu crétine. À savoir, comment des images publicitaires peuvent-elles (encore) passer un discours écologique probant ?
Dès la première scène du film, on sait que ce POINT BREAK 2.0 est raté. Deux raisons à cela : l’acteur Luke Bracey et le scénariste Kurt Wimmer à qui l’on doit, tout de même, Au bout de la nuit (2008), Que justice soit faite (2009), Salt (2010) et, un autre remake massacré, Total Recall : Mémoires programmées (2012). De son côté, Luke Bracey, sorte de mix entre la voix de Chris Hemsworth et la tête de Paul Walker, n’est visiblement que le second, voire le troisième choix d’une production qui a vu Taylor Kitsch, Aaron Taylor Johnson, Chris Pine, Chris Pratt et Nicholas Hoult décliner successivement le rôle – probablement en lisant le scénario de Wimmer. Car s’il y a de vrais comédiens dans POINT BREAK (Edgar Ramirez et Ray Winstone), ils n’ont pas grand-chose à faire tant le film est conçu comme une publicité pour de l’équipement de sport extrême, où les cascadeurs mériteraient d’avoir leur nom au générique à côté de ceux des comédiens.
“Sous ses allures de thriller fonctionnant à l’adrénaline et à la testostérone, le film parle surtout d’écologie.”
À l’évidence, le film ne cherche pas à tisser de relations trop profondes entre les personnages, y compris entre nos deux héros (Utah et Bohdi). Alors que peut-il bien nous raconter ? Sous ses allures de thriller fonctionnant à l’adrénaline et à la testostérone, le film parle surtout d’écologie (le mot est lâché). Alors que les images de paysages se suffisent largement à elles-mêmes, les personnages, enfin surtout Bohdi, se lancent dans des monologues philosophiques autour de l’opposition entre l’homme et la nature. Discours écolo de convenance, mais qui dans la bouche de Bohdi a quelque chose de fanatique, de cultuel, voire presque de mortifère. Fasciné par un pseudo gourou, Ono Ozaki, à qui l’on doit les fameux « 8 Ozaki », sorte d’épreuves physiques où l’on doit maîtriser les forces de la nature, Bohdi veut absolument relever ce défi, porte ouverte au nirvana et à un état extatique. Mais, il le précise lui-même, ce n’est en aucun cas un désir personnel et donc terrestre. C’est autre chose. Pour lui, tenter de faire passer ses idéaux (comme ce pauvre Ozaki, tué par un baleinier norvégien !) est à ce jour inefficace. Maintenant, il faut agir, c’est-à-dire faire acte (sous couvert de spiritualité) et « restituer » ce qu’on a pris à notre chère Mère-Nature. Donc il y a l’idée de ne faire qu’un avec la nature, de trouver un équilibre, plus respectueux… Bohdi parle ainsi de line, de direction à prendre, de choix à suivre, et d’être toujours en accord avec soi. Bref, il enrhume gentiment Utah afin de lui faire changer de camp, et le voir ainsi passer du côté des « gentils » écolos qui détroussent les banques et autres multinationales. C’est à peu près tout pour l’histoire et ses enjeux.
Finalement, le discours du film ne peut être crédible, car il défend son message écolo avec le paradigme qui le détruit – une représentation arbitraire de la nature qui repose sur l’existence de conventions socialisées, une image publicitaire édifiante. C’est le chat qui se mord la queue. À titre de comparaison, Avatar (2009) illustrait bien mieux cette connexion avec la nature, en créant un lien physique, ce fameux bound entre les Na’avi et la planète Pandora. Car, si dans POINT BREAK, Bohdi préfère se suicider dans son énorme vague plutôt que d’être arrêté, c’est bien que son existentialisme, entaché de pessimisme, a fini par avoir raison de lui (la planète est donc condamnée si on suit son raisonnement). À l’inverse, la (re)naissance de Jake Sully sur Pandora, dont l’idéologie nous semble bien plus humaniste, apparaît comme une invitation à vivre, car il a réellement “touché” et saisi la beauté de cette planète, finissant par s’offrir littéralement à elle.
antoine gaudé, 2016
• Titre original : Point Break
• Réalisation : Ericson Core
• Scénario : Kurt Wimmer
• Acteurs principaux : Edgar Ramirez, Luke Bracey, Ray Winstone, Teresa Palmer…
• Pays d’origine : États-Unis
• Sortie : 3 février 2016
• Durée : 1 heure 53 minutes
• Distributeur : SND
• Synopsis : Une série de braquages spectaculaires aux quatre coins du monde met en péril l’équilibre des marchés financiers. Les criminels opèrent aussi bien en motos dans des gratte-ciels new yorkais qu’en « wingsuits » pour s’échapper d’avions au-dessus de la jungle. Johnny Utah, une ancienne légende du moto-cross devenue agent du FBI, va devoir infiltrer le groupe de sportifs de l’extrême que l’on soupçonne d’être à l’origine de ces sidérants braquages. Pour gagner leur confiance, Utah affronte des défis insensés, du surf au snowboard en passant par la chute libre ou l’escalade à mains nues. Alors qu’il pense avoir identifié le cerveau des braquages, il se retrouve entrainé contre son gré dans les activités criminelles du groupe dopé à l’adrénaline…
source : https://www.leblogducinema.com/actualites/breves/critique-point-break-86526/
Commenter cet article