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Darren Aronofsky, "Pi"

Publié le 30 Juin 2018, 10:02am

Catégories : #Philo & Cinéma

Darren Aronofsky, "Pi"

PI
Réalisateur : Darren Aronofsky
Acteurs : Sean Gullette, Mark Margolis, Ben Shenkman, Clint Mansell, Ari Handel
Date de sortie du DVD : 5 juillet 2007

 

Le mathématicien Maximillian Cohen recherche le nombre absolu régissant la vie et le chaos. Poursuivi par des spéculateurs du marché boursier voulant cette clef afin de prévoir les cours de la bourse, et par une secte juive souhaitant, par ce nombre, révéler le véritable nom de Dieu, Maximillian mène un combat entre raison créative et folie destructrice.
Pythagore (500 av. J-C.), fondateur d'une école philosophique influencée par les mathématiques, soutient que tout est nombre : tout ce qui existe un nombre ou peut être exprimé mathématiquement. Le tout ou le cosmos est représenté par le nombre Un, le nombre des nombres, dont tous les autres sont issus par division (chaque nombre fait l’objet d’une représentation graphique et géométrique au moyen de points et de figures). Pour Pythagore, il existe donc dans l’univers un nombre qui exprime à lui seul l’harmonie la plus parfaite et la plus complète. Ce nombre d'or que rédecouvre Max constitue une proportion entre deux nombres ou deux grandeurs - une proportion se retrouvant dans la nature, au point où l’on peut croire que l’harmonie observée dans la nature obéit à cette proportion. Tel serait le cas du corps humain, du pétale des fleurs, des spirales d’une coquille d’escargot etc. Cette proportion serait la clef de la beauté et de l’harmonie dans la nature et dans l’art.

Cependant expliquer le monde par la démonstration, le raisonnement mathématique, reviendrait à poser le monde comme un système régi par la logique. En prenant comme preuve le cycle des maladies epidemiques, les fluctuations de la population animale, la récurrence des taches scolaires, la crue et la décrue du Nil, .M. Cohen théorise le monde selon un syllogisme visant a montrer cette logique scientifique: Or, le monde est-il le fruit d’une logique mathématique ? Et de ce fait, résulte-t-il d’une conscience? A partir du XVIIe siècle s'impose pour toutes les branches de la connaissance un idéal de rationalité dont le modèle certes est mathématique. Les mathématiques proposent bien, à l'exemple de la géométrie d'Euclide, un ordre des raisons qui passe pour applicable quels que soient les objets de connaissance.
En effet, Max essaie de trouver des formules pour tout ce qui l'entoure : soit la séquence mathématique permettant de "prévoir" les cotations boursières; et donc de conduire l'esprit, par déduction de proche en proche à toutes les vérités. Telle est l'idée de Descartes dans les Méditations métaphysiques d' « une mathématique universelle » . Pourtant, il ne suffit pas qu'une proposition soit correctement démontrée à partir de propositions antérieures, encore faut-t-il que celles-ci l'aient été à partir d'autres plus fondamentales encore, jusqu'à ce qu'on remonte à des propositions premières indénombrables. Mais comment peut-on savoir que celles-ci sont vraies ? La reponse de Descartes est qu'elles sont connues de façon immédiate par l'esprit. A la base de toute démonstration, il faut, dit Descartes, qu'existent des idées dont la vérité se voit d'elle-même et qui n'ont pas besoin d'etre démontrées; c'est-à-dire des évidences ( ce que Descartes appelle encore "intuitions").

Mais la démonstration échoue à donner accès universel à la vérité si l'on objecte que dans les sciences de la nature les vérités se découvrent par l'expérience ; que les entités métaphysiques sont-indémontrables selon Kant ; enfin que tous les raisonnements ne sont pas démontratifs (cas des décisions politiques ou morales ). Il faut donc distinguer "démontrer" et "argumenter". Ainsi, Max a beau passer ses journées à tenter de prevoir les coûts de la bourses, fluctuations censées être harsardeuses, pour trouver un sens au monde dans lequel il vit (le monde serait regi par un principe absolu qui le prédeterminerait dans tout ce qu'il constitue, agissant de même façon sur les êtres vivants et non-vivants), sa volonté de maîtriser son environnement lui échappe : Max a des données mais il est incapable de les interpréter. Ce nombre magique, Max le découvrira lors d'un bug informatique, laissant apparaitre une liste de chiffres qui lui est incompréhensible, signe que la mathématique peut bien être comme le dit Platon, un intermediaire entre le monde et les Idées.
Mais en retour son savoir exeptionnel et sa capacité intellectuelle défiant la normale donnent à Max d'affreuses migraines, entre phobies et hallucinations morbides, qui sont à l'origine d'une prise compulsive de médicaments : paradoxalement, dans son désir d'expliquer le monde, Max en perd lui-même toute rationnalité. Sa découverte du nombre d'or l'amène à se faire traquer et le pousse à apprendre la série des 216 chiffres par coeur. Peut-être est ce cela qui lui fait apparaître in fine le rectangle d'or dans le crâne... Cependant la douleur est si forte que Max préfère renoncer à sa capacité à prevoir de façon mathématique le véritable l'avenir en se perçant le cerveau.
Il se réveille alors dans un monde blanc : est -il mort et les scènes qui suivent sont elles la vie qu'il aurait toujours vécue sans ce don ?

frederic grolleau

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