Le Grand Tournant ?
Initiateur de l’Institut de Recherche pour l’Écologie Spirituelle (RISE), et professeur émérite d’anthropologie de l’université d’Hawaï, Leslie E. Sponsel propose une synthèse/ histoire intellectuelle des divers auteurs et mouvements engagés pour la cause écologique afin de conjurer l’écocrise (notamment le dérèglement climatique) que traverse la Terre depuis les années soixante-dix.
La transdisciplinarité dans laquelle il puise lui permet ainsi , à travers un chapitrage original conçu comme une forme arborescente (“Racines”, “Tronc”, “Branches”, “Feuilles” et “Fleurs, graines, fruits”), de convoquer aussi bien festivals (festival annuel du Burning Man du désert du Nevada) et films (Avatar de James Cameron) que figures légendaires connues en Europe (Bouddha, saint François d’Assise , Henri David Thoreau, John Muir, Rudolf Steiner, Martin Buber, Bartholommée Ier, Sa Sainteté le 14e dalaï-lama) pour attester d’une nouvelle conception de la nature qui semble nécessaire afin de mettre un terme à la destruction de notre écosystème (l’écocide) et préserver la santé de notre monde.
Cette approche spirituelle de l’écologie demeure toutefois assez inégale, l’auteur convoquant le plus souvent des auteurs ou des contextes proprement américains, inconnus du public européen, qui plus est en s’appuyant sur un fort fastidieux appareil de notes, plus référentiel au sens strict qu’utile à la consultation.
Si, de fait, certains chapitres sont éclairants et concis (on citera, entre autres les chapitres “Racines” et “Tronc”: Bouddha, saint François d’Assise , Henri David Thoreau, John Muir, Rudolf Steiner en observant au passage que Ralph Waldo Emerson n’est pas développé ici), d’autres paraissent davantage superfétatoires et rebattus (c’est le cas en particulier pour celui dédié au film Avatar d’une rare platitude), l’ensemble louchant ce faisant du côté de la thèse ou l’allocution universitaire pour happy few en lieu et place du pamphlet ou du manifeste que l’on était plutôt en droit d’attendre sur ce sujet brûlant.
De même, si certaines perspectives religieuses, théosophiques, poétiques, animistes, économiques et politiques abondent à bon droit, il paraît dommageable que la question de l’animalisme (à titre d’exemple les positions engagées en France d’une Corine Pelluchon, à la suite des travaux américains de Peter Singer et Tom Reagan, dans son Manifeste animaliste en 2017), dans le sillage du transhumanisme, ne fasse pas l'objet d une prise considération qui eût été bienvenue, ne serait-ce que pour permettre de donner à cette “révolution” annoncée en 1ère de couverture une dimension plus concrète et pragmatique.
frederic grolleau
Leslie E. Sponsel, L’écologie spirituelle. Histoire d’une révolution tranquille, traduction de Anne-Sylvie Homassel, éd. Hozhoni, mars 2017, 512 p. — 21,50 €.
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