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Gilles Schlesser & Eric Puech, "Rose de Paris"

Publié le 7 Mars 2015, 19:04pm

Catégories : #BD

Hey, my Rose !

Reflet direct du titre on ne peut plus éloquent, ce roman graphique tout en teintes sépia et servi par une magnifique couverture, nous présente les déboires d'une jeune bretonne « montée à Paris » en 1925 pour y occuper la fonction de standardiste au central Gutenberg de la rue du Louvre. Accueillie comme colocataire d'une de ses proches collègues, Sidonie, dont on pressent qu'elle a beaucoup de l'oie blanche, notre jeune et jolie provinciale va alors découvrir, au rythme de pages effrénées, un peu trop peut-être, l'étourdissement nocturne des années folles du Bal Nègre, de la Closerie des Lilas ou encore du Jockey. Soit sur fond de jazz tonitruant, entre rires et champagne à gros bouillons, les premières manifestations syndicalistes au nom de la parité homme-femme, les poses esthétiques endiablées de Joséphine Baker ou de Kiki de Montparnasse tout comme les échanges animés entre les grandes figures littéraires du temps, Fitzgerald, Kisling et Hemingway notamment.
Mais, victime du destin stigmatisant les classes sociales avant que de générer leur lutte acharnée selon la dialectique marxiste, Rose, qui pourrait séduire les plus riches tombe amoureuse d'un boxeur second couteau, Victor, plongé dans un braquage de banque qui a mal tourné et transformé en taupe par un inspecteur qui s'intéresse de près au nabab de la cocaïne du tout Paname, Monsieur Paul.
 

Si l'intention de brasser membres plus ou moins éminents de la pègre et artistes aristocrates au travers d'un dessin réaliste est louable – fort bien documenté et maîtrisant son sujet comme à son habitude, Gilles Schlesser offre là le portrait saisissant d’une époque, au travers d'une présentation originale parce que originelle du central Gutenberg, l'ancêtre du groupe Orange France Telecom –, on n'en dira pas autant du graphisme abrupt des personnages sous le crayon ou le lavis d'Eric Puech, qui ne permet pas toujours de saisir les détails d'une scène ou d'un décor. La confusion de la forme rejoint alors la facture abrupt du fond, certaines séquences de l'histoire s'enchaînant parfois de façon décousue quand ce n'est pas « téléphonée » si l'on ose dire.
A courir trop de lièvres à la fois, l'intrigue semble de fait plus "fouillis" que fouillée ; reste que la capitale est bien présentée ici dans la splendeur de sa misère au travers des contradictions qui ne cessent de la constituer tout en la lézardant : Rose de Paris mérite assurément d'être lu pour ce sens du clair-obscur qui parvient à brasser en une centaine de pages la comédie de moeurs sur fond de polar social.
 

Lire un extrait du livre ici
 

frederic grolleau
 

Gilles Schlesser (scénario) & Eric Puech (dessin), Rose de Paris, Parigramme, février 2015, 128 p. - 18,90 €

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