Faut-il entrer dans le cinéma par Redford ou l'inverse ?
Le titre de l'oeuvre ne doit pas tromper : si c'est bien un monolithique Robert Redford qu'il s'agit de présenter, l'ouvrage de Di Lallo qui aspire à une certaine exhaustivité suit un ordre de séquences précis proposé par Patrick Brion : une biographie d'une soixantaine de pages suivie d'une filmographie conséquente (avec résumé, anecdotes, critiques et multiples photos). L'amateur est donc là plus dans le contexte d'une monographie à tendance biographique que dans celui d'une herméneutique du redfordisme, si l'on ose qualifier ainsi ce que serait au cinéma le système Redford.
Di Lallo rappelle dans un bref propos introductif que précèdent quelques citations, non commentées, de l'acteur-réalisateur que Clint Eastwood et Robert Redford seuls peuvent aujourd'hui encore être qualifiés de stars du cinéma hollywoodien. Notamment en vertu du "fait d'avoir mis en scène leur propre vision du monde [, ce qui] contribue peut-être à leur image de star du passé bien sûr, mais également à ce que devrait être une star d'aujourd'hui." Il est alors fort regrettable que cette "dimension universelle" de la star qu'incarnerait Redford en tant qu' "Homme de culture, de réflexion, défenseur de la nature" soit plus imposée qu'exposée.
Avec presque cinquante ans de carrière, " le regard qu'il porte sur la société américaine", nous faisant "partager ses valeurs personnelles" paraît de fait tout du long du livre davantage présupposé et illustré que conceptualisé. Ne boudons pas toutefois notre plaisir de cinéphile car des informations essentielles sont alors mises en avant : Redford débute ainsi au cinéma en 1962 avec War Hunt, sur le tournage duquel il croise l'acteur et réalisateur Sydney Pollack. C'est ce dernier, devenu réalisateur, qui le fera tourner dans sept de ses films, dont Out of Africa avec Meryl Streep, mais Redford travaille également sur d'autres tournages (La Poursuite impitoyable, Les Hommes du président...) En 1980, changement de cap majeur, il passe derrière la caméra et obtient l'oscar du meilleur film pour Ordinary People. Fort de ce succès, il réalise et joue dans les décors superbes du Montana Et au milieu coule une rivière (1995) avec Brad Pitt et L'Homme qui murmurait à l'oreille des chevaux (1998), qui témoignent de son engagement dans la cause écologiste. Autre signe de son implication, il préside le Sundance Film Festival, principal festival pour le développement du film indépendant américain...
Cette somme consacrée à l'une des dernières légendes du cinéma US - de Butch Cassidy et le kid à Gatsby le Magnifque en passant par Les trois jours du Condor - a tout de même l'avantage de condenser en un seul volume l'ensemble impressionnant des films qui portent la patte Redford, montrant au passage que ce beau gosse au sourire ultra white, à l'allure athlétique et à la coiffure de surfeur n'est pas qu'un fantasme féminin en chair et en os mais un homme engagé avec une solide carrière.
Cela faisait certes longtemps qu'aucun livre n'avait été dédié à Robert Redford mais si l'ouvrage, souple et de très belle qualité iconographique, des éditions Riveneuve comble un manque, il n'en reste pas moins que l'on attend toujours sur ce sujet une véritable et complète biographie en français .
frederic grolleau
Georges Di Lallo, Robert Redford, Riveneuve éditions, 2014, 304 p. - 28,00 €.
Commenter cet article